Psyché
Matthew Locke
Psyche (1675) est revendiqué comme un futur modèle du genre lyrique, une nouvelle tentative d’union du théâtre et de la musique. Le roi Charles II, soucieux de s’aligner sur la splendeur artistique de Louis XIV, demande à Matthew Locke de mettre au point le premier opéra anglais. Locke aurait peut-être même composé cette œuvre comme une riposte à la visite de la troupe de l’Académie royale de musique, sous la direction de son créateur Robert Cambert (prédécesseur de Lully) à Londres en 1674.
Composée sur une traduction du livret de Molière, Corneille et Quinault qui avait servi à la Psyché de Lully, cette Psyché anglaise ne s’alignera ni sur le modèle de l’opéra italien, ni sur la nouvelle tragédie lyrique française inaugurée l’année précédente (Cadmus & Hermione de Lully) : ce sera en réalité le tout premier semi-opéra, où l’art lyrique – avec les tout premiers récitatifs anglais – cohabite harmonieusement avec le théâtre, dans la veine des Masks qui l’ont précédé.
La splendeur des effectifs (probablement plus de 100 artistes à la création), la beauté de la musique, l’invention perpétuelle (échos à différents endroits de la scène, instrumentations variées et précisément décrites, folie harmonique des nombreux chœurs) font de cette Psyché un monument inconnu de l’histoire de la musique anglaise, source à laquelle viendront puiser directement Blow et Purcell.
Depuis 2016, l’ensemble Correspondances aborde le genre lyrique par un répertoire non-conventionnel : d’abord des histoires sacrées de Charpentier portées à la scène, ensuite un Ballet de cour – grand genre précédant l’opéra en France – combinant musique, cirque, poésie, machines, décors, costumes, danse…
En 2019, notre choix s’est porté sur cette Psyché anglaise, dont les similitudes avec le Ballet royal de la Nuit sont nombreuses. Revendiquée comme un modèle du genre, cette œuvre se situe à un moment charnière de l’histoire de la musique anglaise : entre le masque de cour et l’opéra italianisant du XVIIIe siècle, le semi-opéra ouvre la voie aux compositeurs phares de la Restauration (Blow et Purcell en premier lieu).
Comme pour le Ballet de la Nuit, mais pour d’autres raisons, seule la partition de Locke nous est parvenue (celle de Draghi, qui contenait de nombreuses danses, étant perdue). Il a donc fallu puiser dans le répertoire musical du théâtre anglais du XVIIe siècle pour recomposer dans son intégralité cette Psyché qui devra ainsi surement plus à Matthew Locke que l’originale !
Musique de Matthew Locke & Giovanni Battista Draghi
Livret de Thomas Shadwell
Créé le 27.02.1675 au Dorset Theatre à Londres
D’après la Psyché de Lully (Paris, 1671)